Destruction de l’acacia et chasse prohibée: Ces atteintes qui ravagent le Tassili

La première phase du programme de l’inventaire du parc du Tassili, lancé en 2014, a été achevée. «Nous avons organisé plusieurs opérations sur des sites sensibles, à savoir Djanet, Bordj El Haouas et Illizi. Nos équipes se déplacent vers Tadrart, un grand site touristique regroupant plusieurs éléments du patrimoine matériel et immatériel de notre pays d’où notre choix de procéder à une répartition du programme en  plusieurs étapes», a précisé Aïcha Issakoukafi, conservatrice et coordinatrice à l’Office national du parc national du Tassili (OPNT).

L’inventaire consiste à «recenser, identifier et élaborer une cartographie du patrimoine matériel de la région» en préparation du prochain séminaire national qui s’intéressera aux «méthodes de répertoriage, de recensement et de conservation du patrimoine».  La chasse et la destruction de l’acacia sont les infractions les plus fréquentes dans le parc du Tassili. L’alerte a été donnée par les autorités locales, lesquelles ont interpellé l’OPNT et la Conservation des forêts sur «ces dépassements», a indiqué Gassou Amghar, P/APC de Djanet.

«Nos équipes organisent des sorties d’inspection sur le terrain et constatent l’ampleur des dégâts occasionnés par la chasse au gibier  ainsi que la destruction de l’acacia», a affirmé Mme Issakoukafi. Face à ces actes, l’OPNT a déposé plainte contre X. «Nous n’avons pas encore identifié les auteurs. Lors de leurs sorties, nos éléments retrouvent des troncs d’arbres brisés, ou carrément du charbon ainsi que des ustensiles utilisés dans la cuisson de la viande. Le parc est très vaste et il est impossible de contrôler les mouvements des individus», a-t-elle ajouté. Selon les statistiques de l’OPNT, neuf actes de destruction d’acacia ont été recensés en 2015 dans les sites de Daou Nat, Timnzazine, Arokame, Akafour, Tintimate, Tin Ibourak, Timat, Amhiouen, Tlmoust et Adjou. 

Sur les traces des guépards
Même s’il n’est toujours pas visible, le guépard fait encore parler de lui dans la région. «Des habitants d’Admer nous ont contactés récemment après avoir trouvé des traces de guépards. Nous avons envoyé une mission qui a séjourné là-bas deux jours. En vain», a expliqué Gassou Amghar. A ce propos, un séminaire sera organisé par le ministère de la Culture pour évoquer cet animal et son éventuelle présence dans le Tassili.

Pour quand le classement des ksour de Djanet ?
Le classement des ksour de Djanet en vue de leur restauration suit son cours, a noté Mme Issakoukafi. «Le dossier du classement des ksour a été soumis en mars dernier à la commission de classement relevant du ministère de la Culture. Des réserves sont encore exprimées vu la complexité du dossier. Pour Zelouaz et Adjahil, nous avons envoyé des plans confectionnés par des architectes qui se sont déplacés sur place. Nos réserves concernent notamment les noms des familles et les limites entre les habitations. Pour le moment, et vu que ces ksour sont un patrimoine relevant des biens habous, les architectes ont réussi à délimiter leur superficie globale mais il s’est avéré impossible de séparer les maisons», a souligné la conservatrice. L’opération de rénovation de ces bijoux ne peut donc se faire avant la levée de ces réserves et le classement de cet endroit comme patrimoine national. 

Développement local : les réserves de l’OPNT
Dans une région comme Djanet qui regorge de sites mondialement connus, l’entame de projets de développement local doit se faire avec beaucoup de prudence, de précautions, de consultations préalables et surtout d’un suivi permanent. L’OPNT a eu l’occasion d’exprimer ses réserves sur plusieurs projets d’utilité publique, mais qui peuvent porter atteinte à la nature et aux sites protégés. C’est ainsi que l’OPNT a été à l’origine de l’arrêt du projet de raccordement au réseau du  gaz naturel de la ville de Djanet. «On a refusé l’utilisation d’explosifs pour l’installation de la canalisation à Fadnoun, un site qui regorge de monuments, en plus de la végétation et de la présence des animaux», a soutenu Mme Issakoukafi. Des écrits ont été transmis aux autorités concernées pour prendre les mesures qui s’imposent. A Ihrir, le parc a exprimé son refus de l’implantation de la station d’épuration vu le risque de pollution des eaux de la guelta. «Cette station présente un risque sur l’eau et la végétation d’Ihrir, la fierté du Tassili. On a proposé de renforcer le budget pour la réalisation de canalisations en hauteur», a préconisé la même responsable.

Un parc fragile 
Les missions de l’OPNT n’ont pas cessé mais elles sont réduites en raison de la situation d’instabilité que connaît cette institution. En plus du chevauchement des prérogatives avec les autres institutions notamment au niveau local, le parc du Tassili est sans directeur général depuis plusieurs années. La vacance de ce poste a fait que les ingénieurs du parc se succèdent pour gérer les affaires courantes. Le parc souffre aussi de l’absence de spécialistes. Actuellement, seuls deux architectes sont mobilisés pour effectuer l’étude de restauration des ksour, une opération qui accuse un retard considérable et qui nécessite une plus forte mobilisation de la ressource humaine.
Cela n’empêche pas l’initiation de quelques actions visant à réhabiliter son statut. Dans la perspective d’un meilleur déploiement, le parc va entamer la réalisation d’un nouveau siège, organiser ses quatre sous-directions et se doter d’un centre d’interprétation. Cela s’ajoute à la réalisation de 23 nouveaux postes de garde lancés il y a quelques mois. Le besoin en ressource humaine qualifiée et spécialisée est ressenti à l’OPNT. «Nous avons besoin de recruter des ingénieurs pour préserver la biodiversité car il est question dans notre programme de lancer une opération de suivi de la biodiversité dans le parc en vertu des deux conventions signées avec l’université des sciences et des technologies Houari-Boumediène de Bab Ezzouar prévoyant l’organisation de deux missions en janvier et novembre pour le suivi et la protection du Cyprès dans le plateau du Tassili.
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